Alaric (394 à 410)

ALARIC


Chronologie

350 à 400
En 394, au cours de l'été, l'empereur romain Théodose emmène une armée de 40.000 hommes, formée de légions romaines commandées par Timasius et Stilicon, et de troupes barbares commandées par les généraux goths Gainas et Saul et par Bacurius, un militaire d'origine ibère qui est comte des domestiques. Parmi les officiers goths se trouve le jeune Alaric. Les 5 et 6 septembre, à proximité de la forteresse Ad Pirum, l'actuelle Hrusica en Slovénie, cette armée affronte l'armée de l'empereur usurpateur Eugène, commandée par Arbogast. Les régiments goths de l'armée de Théodose sont utilisés en avant-garde et subissent d'énormes pertes lors de la première journée qui est plutôt favorable à Arbogast et Eugène. Mais le lendemain, l'affrontement tourne en faveur de Théodose qui remporte la victoire (RFE).

En 395, Alaric est élu et devient roi des Goths (RWO). Au cours de la même année, de retour avec ses hommes dans les provinces orientales, il ne se met pas à la disposition du gouvernement d'Arcadius (RFE). Avec des Goths au nombre de 40.000 individus dont 8.000 guerriers (RWO), il commence à saccager les provinces orientales, jusque sous les murs de Constantinople. Les revendications sont peut-être des établissements fonciers ou un paiement de leur engagement dans l'armée de Théodose l'année précédente ou des promotions. Alaric quitte ensuite les environs de Constantinople pour tenter de passer en Thrace et en Macédoine. Une armée romaine dirigée par Stilicon se porte alors à leur rencontre et Alaric décide de s'éloigner vers le sud. Finalement Stilicon arrive à son contact en Thessalie mais il reçoit une lettre d'Arcadius lui donnant l'ordre de renvoyer à Constantinople les troupes d'origine orientale et de cesser de mener la guerre dans les territoires dépendant de Constantinople. Stilicon obéit, ce qui permet à Alaric de reprendre son expédition militaire (RFE).

En 396, au printemps, Alaric et ses troupes se dirigent vers la Grèce et l'atteignent en passant par les Thermopyles que ne peuvent défendre Mousonios et Gerontios, des officiers fraîchement nommés par Rufin. Alaric s'empare d'Athènes, où seule l'Acropole échappe aux destructions et de Corinthe qui est incendiée. Il ravage le Péloponnèse (RFE).

En 397, après le 7 avril, Stilicon effectue une expédition maritime pour stopper Alaric et débarque à Corinthe. Il bouscule les troupes d'Alaric et les confine au mont Pholoe, à une quinzaine de kilomètres d'Olympie. Alaric et ses troupes parviennent à s'enfuir et quittent le Péloponnèse. Stilicon ne les poursuivant pas, ils effectuent des razzias en Epire (RFE).

En 398, probablement pour obtenir la paix, le gouvernement romain oriental confie à Alaric le titre de maître des milices pour l'Illyricum, au service d'Arcadius, ce qui l'éloigne de Constantinople (RFE).

400 à 450
En 400, Aurelianus adopte une politique très hostile aux barbares, suspendant le paiement des troupes d'Alaric. Selon la règle, le ravitaillement des armées doit être assuré par les préfets du prétoire, mais Alaric prélève directement les ressources dont il a besoin auprès des fabriques, les ateliers publics produisant armes et armures, et auprès des provinciaux pour nourrir ses hommes. en dehors de tout contrôle administratif, il dépouille sans doute largement les provinces dont il doit assurer la sécurité (RFE).

En 401 (RWO, RFE), en novembre, Alaric prend la route de l'Italie. Il passe les Alpes à proximité de la forteresse Ad Pirum, l'actuelle Hrusica en Slovénie, descend vers la Vénétie, triomphe sans difficulté des petites troupes qui défendent le Timavo et l'Isonzo et ravage les campagnes de la région d'Aquilée, puis des autres villes de la province. Les hommes d'Alaric avancent comme un peuple en marche, les femmes et les enfants accompagnant les guerriers (RFE).

Entre 401 et 402, Alaric arrive à Milan, où se trouve l'empereur romain et la cour, et établit son camp à l'est de la ville. Stilicon et son armée, formée de troupes romaines et de mercenaires vandales et alains, viennent à la rescousse de Milan. Un premier affrontement a lieu sur l'Adda, un affluent du Pô. Stilicon refoule lentement Alaric vers l'est, sans combat décisif. Puis Alaric tente d'obliquer vers le sud en direction du centre de l'Italie (RFE).

En 402 (RWO, RFE), le 6 avril (RWO), malgré ses réticences à combattre pendant un jour de fête, Stilicon attaque Alaric le jour de Pâques, à Pollentia, à 60 km d'Asti. Alaric et son armée sont battus et doivent abandonner une grande partie de leur butin, alors que Stilicon fait prisonnier un grand nombre de familles, dont celle d'Alaric. Alaric et une partie de ses hommes parviennent à fuir et cherchent ensuite à négocier avec Stilicon qui les autorise à retourner en Illyricum. Cependant, Alaric se retire avec une grande lenteur. En mai, ou en juin, Alaric n'est qu'à Vérone, d'où il tente d'infléchir sa route vers le Col du Brenner qui peut peut-être le conduire en direction de la Gaule par le Norique. Stilicon intervient rapidement. La bataille de Vérone est une déroute pour Alaric. Il y perd presque toute son armée et ne peut s'enfuir qu'avec quelques hommes. Autrefois maître des milices en Illyricum, il devient maintenant le chef d'une bande rebelle qui s'établit, sans titre, dans les provinces du diocèse de Pannonie (RFE).

En 405, Stilicon conclut un accord avec Alaric. Il lui promet le rang de maître des milices de l'Illyricum, resté vacant depuis 402, et lui demande de transférer son armée en Epire pour être prêt à s'établir en Macédoine le moment venu. Au cours de l'année, en automne, Alaric fait mouvement vers l'Epire et attend les ordres de Stilicon mais celui-ci doit d'abord s'occuper d'invasions en Italie et en Gaule (RFE).

En 408, soit à la demande de Stilicon qui souhaite respecter la volonté impériale, soit de sa propre initiative, Alaric quitte l'Epire et conduit son armée jusqu'à Emona, l'actuelle Ljubljana en Slovénie, aux portes de l'Italie. Il envoie alors des représentants demander le paiement des années passées au service d'Honorius en Epire, soit 4.000 livres d'or, à défaut de quoi son armée envahira l'Italie. Le Sénat accepte la demande et la somme est versée. Le 22 août, Stilicon, le principal interlocuteur d'Alaric est tué à la demande de l'empereur romain et les familles des soldats partisans de Stilicon sont massacrées. Par la suite, Alaric est toujours décidé à conclure la paix avec l'empereur romain et il demande de nouveaux émoluments. Mais l'empereur Honorius refuse. Aussitôt, Alaric et son armée pénètrent en Italie et marchent sur Rome. Aucune force romaine ne peut s'interposer. Au contraire, Alaric est rejoint par les soldats de Stilicon dont les familles ont été assassinées en août. En novembre, Alaric commence le siège de Rome. Il ne souhaite pas prendre la ville mais obtenir les richesses qu'on lui a refusées ainsi qu'un statut dans l'armée d'Honorius. Il négocie avec le Sénat alors que l'empereur est à Ravenne. L'assemblée accepte de payer une rançon de 5.000 livres d'or et 30.000 livres d'argent, ainsi qu'une grande quantité de soieries, d'épices et de peaux. Alaric propose aussi un traité militaire et un échange d'otages. Finalement l'empereur Honoris accepte ses conditions. Alaric lève alors le siège et part en direction de Pise (RFE).

En 409, à la fin de l'hiver, malgré l'accord passé avec l'empereur Honorius, les troupes d'Athaulf, beau-frère d'Alaric et l'un de ses lieutenants, qui était venu le rejoindre en Italie, sont attaquées près de Pise. L'armée d'Alaric retourne alors à Rome. Il autorise une ambassade composée de sénateurs et du pape Innocent, évêque de la ville, à se rendre à Ravenne, sous escorte gothique, pour reprendre les négociations. Cette fois, Alaric ne demande plus de riche butin mais un établissement territorial durable et officiel. Il souhaite en effet s'établir en Vénétie, en Norique et en Dalmatie, après avoir reçu une somme d'or et une certaine quantité de blé. Jovius, préfet du prétoire en Italie, est favorable à une négociation avec Alaric. Il demande à l'empereur Honorius de conférer à Alaric le titre de maître des milices afin de pouvoir négocier à la baisse les prétentions des Goths. Mais Honoris refuse, disant qu'il n'accorderait jamais ni une dignité ni une fonction à Alaric ou à quelqu'un de ses parents. Finalement, Alaric retourne vers Rome et Jovius demande à Honorius de prêter un serment solennel de faire la guerre jusqu'au bout à Alaric. Honorius accepte, fait appel à des Huns, sans doute parmi ceux établis en Pannonie, pour l'assister dans les combats et demande des renforts au gouvernement de Constantinople, reconnaissant le titre d'Auguste à l'usurpateur Constantin. Réticent à l'idée d'attaquer Rome, Alaric fait une nouvelle tentative de négociations. Il envoie une ambassade composée d'évêque italiens porter à l'empereur des demandes encore plus modestes que les précédentes. Il ne réclame plus d'or mais seulement du blé, renonce à la fonction de maître des milices et propose de s'établir seulement dans les provinces du Norique. A nouveau, Honorius refuse, affirmant qu'il est lié par son serment. Cette fois, Alaric va jusqu'à Rome et entreprend un deuxième siège. A la fin de l'année, il négocie à nouveau avec le Sénat et lui propose d'élire un empereur. Le Sénat élit alors Attale, son nouveau préfet de la Ville, tout juste revenu de Ravenne (RFE).

Entre 409 et 410, Attale envoie à Honorius une ambassade lui demandant de déposer la pourpre et le menaçant de mutilation et d'exil s'il refuse. Une armée de Rome, sous les ordres de Constans, nommé comte d'Afrique par Attale, se rend dans la province d'Afrique pour en prendre le contrôle mais elle est anéantie par Heraclianus qui interrompt le ravitaillement de Rome. Pendant ce temps, les armées gothiques s'emparent de la plupart des villes du nord de l'Italie et mettent le siège devant Ravenne. Mais l'arrivée de renforts de l'empereur d'Orient permettent de dégager la ville (RFE).

En 410, en juillet, Alaric fait déposer Attale par le Sénat et tente de rouvrir les négociations avec Honorius. Une rencontre est organisée à 12 km de Ravenne. Mais c'est une embuscade. Une petite troupe commandée par le Goth Sarus, resté fidèle à Honorius après la mort de Stilicon, attaque l'ambassade gothique. Alaric s'échappe et reviens à Rome, où le siège est de nouveau établi (RFE). Le 24 août (RWO, LOM), ou le 25 août (RFE), les Goths entrent dans la ville par la porte Salaria qu'on leur a ouverte de l'intérieur. Ils dévastent la propriété impériale des Jardins de Salluste, balayant toute opposition, descendent jusqu'au forum et mettent la ville à sac, Alaric donnant l'ordre de respecter les lieux sacrés et de préserver le vie de ceux qui y trouvent refuge. Cependant, une partie des trésors liturgiques de Saint-Jean de Latran sont volés, dont un ensemble de statues d'argent pesant plus de 600 kg (RFE). La ville est pillée durant 3 jours (RWO, RFE, LOM). Après le sac de Rome, Alaric et son armée se dirige vers le sud, peut-être avec le projet de passer en Afrique pour s'y établir durablement. Ils ont dans leurs bagages un riche butin et des otages, dont Attale, l'empereur déchu, et Aelia Galla Placidia, la demi-sœur des empereurs Honorius et Arcadius. Alaric tente une traversée en Sicile et rassemble une flotte à Reghium, l'actuelle Reggio di Calabria, mais une tempête la détruit en grande partie. A la fin de l'année, aux environs de Cosenza, en Calabre, Alaric meurt, sans doute de maladie. Ses hommes détournent alors le cours du fleuve Busento pour l'y ensevelir avec un riche dépôt funéraire, et choisissent pour chef Athaulf, le beau-frère d'Alaric (RFE).


Sources de l'article

RFE : Claire Sotinel, Catherine Virlouvet (dir.), Joël Cornette (dir.). Rome, la fin d'un empire, de Caracalla à Théodoric. Collection Mondes anciens. Editions Belin, 2019.
RWO : Joël Schmidt. Le royaume wisigoth d'Occitanie. Collection Tempus. Editions Perrin, 1992, réédition 2008.
LOM : Joël Chandelier, Joël Cornette (dir.). L'Occident médiéval, d'Alaric à Léonard. Collection Mondes anciens. Editions Belin, 2021.