Piankhy (-751 à -721)

PIANKHY


Chronologie

-800 à -750
En -751, Kachta est probablement maître du pays de Koush, de la Basse Nubie et, plus ou moins, de la Haute Egypte ou, du moins, du domaine d'Amon de Thèbes (EP). Il décède au cours de l'année (HC99). Son fils Piankhy, aussi appelé Piye, lui succède (EP, HC99), et devient qore, un titre décerné au roi mais aussi à d'autres personnalités importantes du royaume de Koush, dont la capitale est alors Napata (EP). Au cours de son règne, Piankhy rénove et agrandi le Grand Temple d'Amon, au pied de la montagne sacrée du djebel Barkal, portant sa longueur totale à 156m (HC99). Si son père, Kachta, n'était pas encore maître de la Haute Egypte, Piankhy en prend probablement possession au début de son règne et est désormais à la tête d'un immense territoire structuré autour du Nil (EP). Cependant, ce contrôle de la Haute Egypte, est peut-être indirect et peut-être même interrompu notamment par le règne de Iny, un roi thébain (ODE). Au cours de son règne, Piankhy a pour épouses Abalo, sa sœur, et Tabiry, sa cousine, fille d'Alara qui est le frère de Kachta. Il a pour enfants Taharqo et Chépenoupet II. Egalement au cours de son règne, comme lors du règne de son père Kachta, le poste de Grand Prêtre d'Amon, le plus élevé dans la hiérarchie du temple et qui échoie depuis le règne de Shéshonq I, entre -945 et -924, à un fils de roi régnant, semble être laissé vacant, tandis que la gestion du poste de troisième prophète d'Amon est laissé aux mains de Pasiamennebnesouttaouy, fils d'une grande famille de notables thébains dans laquelle cette charge est transmise de génération en génération depuis près d'un siècle (EP)

-750 à -700
Au début des années -730, un changement très profond des équilibres politiques a lieu au sein des nombreux royaumes du nord de l'actuelle Egypte. Tefnakht, roi de Saïs, devient le nouvel homme fort de la région et se présente comme le chef des Lébous et des Méshouesh, deux groupes de combattants aux noms libyens. Tefnakht parvient à étendre son autorité sur Memphis et tourne son regard vers le sud, menaçant Peftjaououaouibastet, roi d'Héracléopolis. Il suscite ensuite une coalition entre les principaux royaumes égyptiens du Delta du Nil. Nimlot, roi d'Hermopolis, le royaume qui se situe à la frontière sud du royaume d'Héracléopolis (EP) et qui, jusque là, est allié ou vassal de Napata (EP, ODE), accepte de rejoindre l'alliance de Tefnakht, et Héracléopolis est attaquée (EP).

Vers -730, en l'an 21 de son règne, Piankhy entame une longue campagne contre la coalition menée par Tefnakht. Dans un premier temps, il envoie deux de ses généraux (EP, ODE), déjà installés à Thèbes (ODE), pour affronter Tefnakht et ses alliés, alors qu'ils font le siège d'Héracléopolis (EP). Les koushites repoussent les coalisés puis reviennent vers le sud pour faire le siège d'Hermopolis où Nimlat s'est réfugié. Dans un deuxième temps, Piankhy s'implique personnellement dans les opérations. Il quitte Napata après les fêtes de Nouvel An et rejoint Thèbes au mois de mars pour célébrer la fête d'Opet. Il décide dans un premier temps de mettre un terme au siège d'Hermopolis. Les négociations sont conduites avec Nestjenet, l'épouse de Nimlot et ce dernier finit par se soumettre. Prenant la direction du nord, l'armée koushite s'empare ensuite des différentes forteresses et villes fortifiées qui verrouillent la route du Delta du Nil. El-Hibeh et Ititaouy tombent l'une après l'autre. Le fils de Tefnakht tombe aussi entre les mains de Piankhy puis Memphis, dont les Saïtes avaient organisé la défense, finit par être prise à son tour. Cette prise de Memphis marque alors l'échec définitif de la coalition. Dénonçant leur alliance avec Tefnakht, Ioupout, roi de Léontopolis, Akanosh, roi de Sébennytos, Pétéisé, roi d'Athribis, et Osorkon IV, roi de Tanis, ainsi que plusieurs chefs du nord de l'actuel Egypte, reconnaissent l'autorité de Piankhy (EP). Ces contestataires doivent aussi verser d'abondants tributs, sauvegardant cependant tous leurs pouvoirs locaux (HC99). L'impôt d'Hermopolis rejoint les coffres du trésor royal napatéen, tandis qu'une grande partie des terres royales confisquées aux rebelles en Moyenne Egypte est attribuée au temple d'Amon, au grand bénéfice des familles sacerdotales de la région thébaine. En Basse Egypte, les trésors et les greniers de Memphis sont donnés au domaine d'Amon de Thèbes mais aussi au domaine de Ptah, la principale institution religieuse memphite. Piankhy effectue ensuite une tournée des principales villes du Delta du Nil où ses nouveaux vassaux multiplient les serments de fidélité. Finalement, Tefnakht est contraint de négocier avec Piankhy qui envoie à Saïs un notable thébain et le général Paourem pour le représenter. Tefnakht sauve sa tête et son trône mais doit proclamer par écrit sa soumission au nouveau maître de l'Egypte. Tefnakht et ses anciens alliés reconnaissent Piankhy comme leur seul maître au cours d'une cérémonie où chacun se voit assigner une position hiérarchique dominée par 4 rois, désignés comme pharaons, Nimlot d'Hermopolis, Peftjaouaouybasset d'Héracléopolis, Osorkon IV de Tanis et Ioupout de Léonpolis. Ainsi, Piankhy n'établit pas un mode de domination directe sur l'Egypte. Il ne nomme pas de gouverneur mais reconnaît la place de certains dirigeants locaux au sein d'une hiérarchie dont il est le maître. La création d'une confédération de royaumes vassaux en Moyenne Egypte et en Basse Egypte, qui semble correspondre aux habitudes politiques napatéennes, permet de dominer un ensemble politique fragmenté. Piankhy retourne ensuite dans le pays de Koush, certainement suivi par l'essentiel de ses hommes. Finalement la présence napatéenne en Moyenne Egypte et en Basse Egypte sous le règne de Piankhy est imperceptible et Abydos semble constituer la limite nord de l'implantation des Napatéens dans la Vallée du Nil. Certainement à la suite de cette campagne en Egypte, une stèle de 1,83m de haut et de 1,23m de large, est très finement gravée de 159 lignes de hiéroglyphes qui décrivent le récit détaillé des évènements politiques qui ont conduit le qore à intervenir et relatent la campagne qui lui permit d'imposer son autorité aux rois et roitelets d'Egypte. Piankhy se tient au centre du cintre et, devant Amon assis sur son trône, reçoit l'hommage ou la soumission des rois égyptiens, au premier rang desquels se tient Nimlot d'Hermopolis, qui, seul, a le droit de figurer debout suivi d'un cheval (EP).

En -721 (HC99), ou vers -720, Piankhy décède (EP) et laisse le trône du royaume de Koush vacant (HC99). Par la suite, il est inhumé dans la nécropole d'El-Kourrou (RSS, HC99), sous une pyramide, la future tombe Ku 17, dont la chambre funéraire est creusée sous la surface du sol et le plafond voûté, au niveau du sol, est construit à l'aide d'un assemblage de petits blocs (RSS). Shabataqo prend probablement la succession de Piankhy sur le trône du royaume de Koush (RSS, EP). Mais il est aussi possible que ce soit Shabaqo qui monte sur le trône (RSS, EP, HC99).

1800 à Actuel
En 1862, un officier égyptien découvre dans le temple d'Amon du djebel Barkal la stèle gravée suite à la campagne de Piankhy en Egypte. Elle est nommée Stèle de Piye, ou encore Stèle des victoires de Piye. Par la suite, la stèle sera transférée au Musée égyptien du Caire (EP).

Entre 1918 et 1939, George Andrew Reisner fouille la nécropole royale d'El-Kourrou et la nécropole royale de Nouri. Dès 1923, il propose une première chronologie de l'ensemble des règnes des rois de Nubie du Ier millénaire av. J.-C. (EP).

En 2014, tandis que la succession de Piankhy sur le trône du royaume de Koush est sujet à controverse par rapport à l'ordre des règnes entre Shabataqo et Shabaqo, Frédéric Payraudeau propose que Shabataqo soit le successeur direct de Piankhy et que Shabaqo vienne ensuite (RSS, EP).

En 2016, la chronologie de l'ensemble des règnes des rois de Nubie du Ier millénaire av. J.-C. proposée par George Andrew Reisner en 1923 est toujours valable dans les grandes lignes, bien que de nombreux points fassent l'objet des discussions entre les chercheurs (EP).


Sources de l'article

EP : Damien Agut, Juan Carlos Moreno-Garcia, Joëlle Cornette (dir.). L'Égypte des pharaons, de Narmer à Dioclétien. Collection Mondes anciens. Editions Belin, 2016.
HC99 : Pascal Vernus, égyptologue, directeur d'études à l'EPHE, Paris. Les pharaons noirs. Histoire & Civilisations 99, novembre 2023.
ODE : Frédéric Payraudeau. Les obscurs débuts de la domination soudanaise en Égypte (deuxième moitié du VIIIe s. av . J.-C.). Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 158e année, N. 4, 2014. Version en ligne Persée.
RSS : Frédéric Payraudeau. Retour sur la succession Shabaqo/Shabataqo. Néhet 1, 2014, p. 115-127. Version en ligne Academia.